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Valéry Bonneau, écrivain

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Une pensée mécanique

1 février 2019 by Valery Leave a Comment

Soixante-dixième Nouvelle noire pour se rire du désespoir. Je ferai un petit truc pour la 75e je crois. 

En attendant, une idée toute simple pour cette 11e nouvelle de la quatrième saison : à un repas de famille, une voix finit toutes les phrases des convives. Énervant, non ?

Pour les oeuvres autour de la nouvelle, vous pouvez suivre sur Twitter, Facebook, Instagram. Mais comme je m’éloigne de plus en plus de ces réseaux, j’en ai aussi fait un article de blog. Comme dans le temps.

NouvellesNoires S04E11 Une Pensee Mecanique Bandeau-min

Adam allait expliquer que « C’est la faute des immigrés » lorsqu’une voix mécanique l’interrompit d’un C’est la faute des immigrés. Il observa la tablée, cherchant à déterminer d’où venait le son. Son oncle parut surpris, tout comme sa nièce, ses cousins, cousines, ses parents, tout le monde s’arrêta, mais personne ne fut à même de trouver l’origine de ce bruit.

Alors Jean, son oncle bien aimé, reprit « Mais oui, tu les vois bien les migrants » et avant qu’il ne termine sa phrase, Anne, l’anarchiste de service lança « Ce ne sont pas des migrants mais »… des réfugiés. Et les derniers mots provenaient de la même voix métallique qui avait interrompu Adam.

Tout le monde s’observa. Cette deuxième intervention levait le doute sur la première, enracinait la stupeur. Mais aucun des membres de la famille ne comprenait d’où venait le bruit. La mère d’Adam tenta :

– Il y a un ventriloque parmi nous maintenant ? ponctué de quelques rires gênés.

« Ce sont peut-être des réfugiés, mais la vérité c’est que »… Ce sont des dangers publics !

Pour la troisième fois, la voix terminait une phrase.

Enfin, on se tourna vers Benjamin, l’ami de Anne.

Après tout, on ne le connaissait pas lui. Il sortait avec Anne. Il appartenait à cette sale race de « gauchisses » comme on disait dans la famille. Mais comme il souriait, aussi nerveusement que niaisement, et qu’il était difficile d’affirmer que la voix provenait de son coin, on se désintéressa de lui. D’où venait-elle d’ailleurs cette voix ? Elle tombait comme si elle arrivait du ciel, mais un effet spatial digne d’un film empêchait d’identifier avec précision l’origine.

La mère d’Adam songea que ces interruptions détendaient l’atmosphère et évitaient que les conversations s’enveniment trop rapidement. Mais l’oncle Jean restait bien décidé à obtenir le dernier mot :

– Ce qui se passe, c’est qu’on est trop bon avec eux.

– Eux, mais eux… Ce sont des êtres humains aussi !

Encore la voix. Anne se renfrogna. Qu’est-ce qu’il était humiliant de se faire terminer ses phrases, sous son nez !

Elle fusilla du regard Jean qui, s’il appréciait ce soutien inattendu, ne s’en méfiait pas moins.

– Ah, tu vois, tu répètes de telles banalités qu’une machine les dit à ta place. Tiens, laisse-moi donc finir. Tes migrants là, ils sont comme nos Arabes, un jour… Ils nous remplaceront tous.

Le rouge monta aux joues de Jean, pris en flagrant délit, qui goûta peu cette nouvelle intervention.

Anne ne lâcha rien :

– Il n’y a pas que moi qui profère des platitudes.

La grand-mère Anita observait la tablée en souriant. Ces interruptions l’amusaient et changeaient des sempiternelles discussions de famille, tournant autour des trois mêmes sujets, le racisme, les politiques et le football, trois sujets qui déclenchaient invariablement les mêmes querelles stériles. Elle était la seule à apprécier le moment, la mère d’Adam commençant à s’inquiéter devant cette voix divinatrice.

Le père d’Adam en profita pour se lancer dans la mêlée :

– Allez arrêter avec vos histoires de migrants, moi je préférerais qu’on parle des élections. Vous voyez qui pour la gauche ?

Sa femme s’empressa de dire :

– De quelle gauche parles-tu ? Je n’ai vu personne à gauche…

Et elle laissa mourir sur ses lèvres les mêmes mots qui sortaient de nulle part.

Cette fois, ce n’était plus possible ! Alors sur chaque sujet, pour chaque membre de la famille, on allait finir leur phrase.

– On peut lire dans les pensées des gens maintenant ? s’étonna-t-elle à haute voix.

– Le terme de pensée me parait un peu flatteur pour qualifier les propos qui se tiennent autour de cette table.

L’ami d’Anne venait de prendre la parole, sur le ton neutre de l’observateur.

– Dis donc, d’où tu te permets ? lancèrent Jean et Adam en choeur. On t’invite chez nous et tu nous insultes ?

– Je ne fais que constater ce que remarque la machine.

Et il posa sur la table un petit boîtier.

– Allez-y continuez à parler.

– Quoi, quoi, continuez à parler, tu crois qu’on peut parler sur commande, comme ça ?

– Oui, je crois.

– Oh non, mais je te jure, ces jeunes vraiment, ils n’… ont plus de respect, de mon temps c’était autre chose.

L’engin infernal venait de libérer la phrase tandis que les lèvres de Jean remuaient pour former les mêmes mots.

– C’est de la sorcellerie ? demanda la mère d’Adam, tandis qu’elle se reculait de la table.

– Oh non, aucune sorcellerie, sinon l’envoûtement qui s’est abattu sur l’humanité entière pour qu’elle se rétrécisse, qu’elle amenuise ses pensées au point de se révéler si prévisible.

Le père et le frère observaient avec inquiétude la boîte et avec méchanceté son détenteur.

– Tu vas t’expliquer dis ? Sinon…

Anne ne lui témoignait pas non plus beaucoup de chaleur, son appareil l’ayant par deux fois interrompu.

– Ce petit boîtier n’est rien d’autre qu’une base de données. Il contient les phrases les plus bateaux, celles qui viennent toujours en réponse aux arguments les plus classiques. Avec un peu d’Intelligence Artificielle pour s’adapter à la manière de parler de chacun. Je l’ai créé pour montrer aux gens à quel point ils ne pensent plus par eux-mêmes, mais pas automatisme. Cet appareil, activé dans une conversation, s’il se met en route prouve que nous ne pensons pas, mais choisissons des éléments prépensés pour nous.

– Ah, et toi, le mariole, tu es plus fort que tout le monde et tu penses tandis que nous, les perroquets, on répète c’est ça ?

Il embrassa la table du regard, leva un sourcil interrogateur :

– Peu importe ce que je pense, le but n’est pas de se moquer. Mais de constater. Allez-y, essayez d’avoir une discussion sur un sujet politique, vous verrez que tous les arguments que vous développez s’enchaînent soigneusement, comme si d’autres personnes parlaient. Si cela ne vous gêne pas, vous devriez vous interroger sur vous-même.

– Encore un truc de gauchiste, lança Jean.

– L’appareil fonctionne avec tous les types d’arguments préparés. De gauche, de droite ou pas.

La perplexité laissait tout un chacun coi. Puis :

– C’est dangereux ton bourrier là, moi je dis… qu’il faut l’interdire.

Alors Benjamin, tout fier, afficha son sourire le plus assuré :

– Vous savez ce n’est pas dangereux… Et la voix métallique de conclure : en soi, ce n’est qu’un outil.

Si vous avez aimé cette nouvelle noire, découvrez les autres Nouvelles Noires pour se Rire du Désespoir

Crédit photo : Pixabay, Tama 66

Filed Under: Nouvelles Noires

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